Chapitre
2
Une odeur de brulé accompagnait la fumée noire qui
s'échappait du dessous de la porte du bureau. Personne ne sembla s'en
inquiéter, et les étudiants continuaient leur chemin sans y prêter attention.
— Une pincée je t'avais dis.
— Oui, ben c'est ce que j'ai mis.
— Ah bon ? Donc pour ton mettre l'équivalent d'un poing
entier c'est une pincée ? Et bien, il va falloir revoir tes définitions parce
qu'à ce rythme là tu n'es pas prête de faire une potion correcte.
— Tu m'énerves, tu le sais ça ? Tu critiques, toujours,
sans arrêt, mais à part être posé sur mon épaule à juger tout ce que je fais et
à prodiguer des mauvais conseils, tu n'es pas d'une grande utilité.
— Je te rappelle qu'au départ c'est toi qui m'a donné la
capacité de parler. J'aurai pu être un animal de compagnie comme tous les
autres mais non, madame a voulu faire des expériences. Et qui se plaint
aujourd'hui ?.
— Oui, ben pardon, mais en tout cas maintenant personne
ne t'oblige à rester avec moi, ton pouvoir ne t'oblige pas à vivre
éternellement sur mon épaule.
— Attention, ne joue pas à ce jeu là avec moi.
Doc Marmotte retrouva son
calme, elle versa une potion d'annulation dans sa mixture noirâtre. La fumée
s'évapora en un clin d'œil, comme réabsorbée subitement par le chaudron, seul
demeurait maintenant l'odeur de brulé qui avait déjà imprégné la pièce.
— Bon, maintenant que tu as fini de recouvrir l'étage
avec les effluves de ton échec, est-ce que je peux avoir droit à ma ration ?
— Tu es une vile créature, et oui, la voilà ta ration.
Sur ces mots, Doc
Marmotte prit un petit sachet de granulés bleus dans sa poche et en versa
quelques uns sur la paume de sa main gauche, qu'elle monta au niveau de son
épaule. Le ragondin les sniffa d'une traite avant de laisser échapper un petit
bruit de jouissance et de s'affaler, n'étant plus retenu à sa maitresse que par
sa queue disposée en crochet le long de son cou.
— Souristine veut te voir? dit une voix derrière la
porte.
Doc Marmotte déposa
délicatement le ragondin sur un petit coussin avant de sortir de sa chambre en
marche rapide. Personne ne faisait attendre Souristine. Elle traversa le patio
qui séparait sa chambre de la salle principale du bâtiment. Des dizaines
d'apprentis sorciers profitaient en plein air d'un des courts moments de
répit qu'ils avaient entre deux enseignements. Quelques uns la saluèrent, mais
perdue dans ses pensées Doc Marmotte ne leur répondit pas.
La grande porte du bureau
principal s'ouvrit à son arrivée.
Souristine était assise à
son bureau, l'air inquiet. Cette pièce était sacrée pour tous les occupants de
l'académie, élèves et professeurs. Peu de gens avaient vu ce bureau. En bois
d'érable millénaire, il semblait peser plus lourd que le monde lui même. Ses
contours, sculptés, relataient les combats des mages lors de la dernière guerre
de la lune noire. Souristine était assise, le dos si droit qu'on aurait pu la
croire suspendu par un fil. Des dizaines de feuilles s'étaient éparpillées sur
le bureau, une plume de phoenix blanc était posée sur la pile centrale. Si
cette plume n'existait pas, beaucoup pourrait penser que le phoenix blanc n'est
qu'une légende, son apparition n'ayant été relevé que quatre fois dans
l'histoire. Souristine discutait avec un homme que Doc Marmotte avait l'impression
d'avoir déjà vu mais aucun nom ne lui revenait. Il était de taille moyenne,
d'un aspect discret, manteau sombre et lourd. Sa carrure n'était pas
impressionnante mais pourtant sa prestance poussait à s'en méfier. Doc Marmotte
se souvint s'être déjà fait cette remarque par le passé mais sans plus de
précision.
Souristine coupa sa
discussion avec l'homme d'un geste de la main et se tourna vers Doc Marmotte.
— Asseyez-vous, s'il vous plait.
Un siège ayant été
préalablement posé devant elle à cet effet, elle s'exécuta sans attendre.
— Je vous ai fait venir pour vous soumettre une mission
importante. Connaissez-vous Qffwffq[1] notre ami ici présent ?
— Oui.
Cherchant dans sa
mémoire, Doc Marmotte tenta de remettre une situation, un lieu, un moment sur
ce visage, mais tout ce qui lui revenait c'était une impression peu agréable,
non pas de danger, mais d'antipathie. Il ne fallait rien laisser paraitre. Sa
présence devant Souristine l'imposait, et quelque serait la mission dont elle
venait de parler, il lui faudrait répondre par l'affirmative, sa place ici en
dépendait.
— Je voudrais que vous partiez avec mon ami ici présent
et que vous alliez aux mines éternelles. Une perturbation majeure de l'Ether y
a été détectée et je veux savoir de quoi il retourne.
— Comme vous le souhaiterez. Mais pourquoi moi ? Pourquoi
que nous deux ? demanda Doc Marmotte.
— Parce qu'il doit en être ainsi. Cela vous dérange t'il
Qffwffq ?
— Non.
Ce furent ses seuls mots,
avant que Souristine ne les congédie, après les avoir invités à mener à bien
leur mission dans les plus brefs délais.
Les portes se refermèrent
derrière les deux nouveaux coéquipiers.
— Vous avez un cheval ? demanda Doc Marmotte pour essayer
de lancer une conversation.
— Oui.
— De toute évidence, je n'aurais pas de phrase complète de
votre part pour aujourd'hui ? dit avec cynisme.
— Nous avons une mission, le plus important est de la
mener à bien rapidement, et il me semble que le principe de cette mission n'est
aucunement de faire connaissance.
Il y eut un silence et
Qffwffq reprit.
— Cela vous convient il comme phrase complète ?
Sans attendre sa réponse,
il se retourna et se dirigea vers les écuries. Doc Marmotte répéta la dernière
phrase de son coéquipier sans articulier, en signe de moquerie, mais
discrètement pour ne pas que ce dernier ne le remarque.
— Je vais préparer mes affaires, je vous retrouve aux
écuries, conclut-elle.
**
La canopée ne laissait
passer qu'un léger fil de lumière qui se dessinait en arabesques infinies au
sol. Le convoi avançait à faible allure. Il faut dire que la qualité de la
route n'aidait pas. A l'origine, le chemin des soupirs devait servir de route
principale dans la foret des EBM, mais dès son ouverture, les vols, pillages et
rapts en série avaient vite fait d'en faire le trajet à éviter.
Malheureusement, aucune autre ébauche de route n'avait été entamée en
remplacement et ce chemin resta, paradoxalement, le plus sur pour ne pas se perdre. Son nom lui
venait de la première réaction des gens lorsqu'on leur demandait ce qui était
arrivé à leurs marchandises une fois qu'ils en sortaient.
Faisant fi des
avertissements et des rumeurs, légendes, et témoignages, un commanditaire avait
demandé que sa marchandise, arrivée depuis la mer, au delta de l'Erygma, soit
acheminée via ce parcours maudit jusqu'à Vorrim. Mais ne voulant rien laisser
au hasard, il recruta une escorte dont la renommée n'était plus à faire, le
Fléau.
Le convoi se composait
d'un seul chariot, un cube géant en bois avec quatre roues, sans fenêtre, ni le
moindre espace pour en deviner le contenu. Il était conduit par un seul cocher
dirigeant les 2
deux chevaux. Quatre
cavaliers couvraient les angles en permanence. Leurs masques ne révélaient ni
leur race, ni leur sexe. Huit guerriers, à pied, fermaient la marche du convoi.
Quant au Fléau, il était devant et ouvrait le passage.
— Halte.
Cet ordre semblait venir
de la droite de la route, mais personne ne se présenta.
Sans Trema leva sa main
droite, faisant ainsi signe au convoi de s'arrêter.
— Continuez votre chemin en abandonnant le chariot ici et
il ne sera fait de mal à personne, ajouta la mystérieuse voix.
Sans Trema baissa sa
main, mais personne ne bougea.
— Ceci est un ultimatum. Nous vous tuerons tous si vous
forcez le passage ou si vous ne faites pas ce que nous demandons, menaça
l'inconnu, toujours caché.
Une flèche siffla. Puis
un cri. Et un choc.
Un homme venait de tomber
du haut d'un arbre après avoir reçu une flèche d'Uberklaus dans la cuisse. Il ne lui avait fallu que trois phrases
pour localiser sa cible et faire mouche.
— Tu veux bien aller l'interroger pour savoir s'il est
seul ou s'il va falloir en faire un exemple, s'il te plait, demanda Sans Trema au troisième membre du
Fléau.
Le pauvre voleur, car oui
nous pouvons dès à présent le plaindre de son sort, vit alors une orque
descendre de son loup et s'approcher de lui, d'un pas aussi lent que
terrifiant. Sa peur fut telle qu’il en oublia un instant la douleur que
générait cette flèche qui lui traversait la cuisse.
Le marteau de guerre que
l’orque portait n'annonçait rien de bon.
Une fois devant lui, elle
fit un tour avec son bras et fracassa le crane du voleur, sans sommation.
Elle se tourna vers ses
deux acolytes.
— Il voulait servir d'exemple, ça se voyait dans ses
yeux.
Jaddo arracha une partie
de la chemise du voleur, et essuya son marteau recouvert d'un mélange de sang,
d'os et de matière grise.
La foret laissa alors
apparaître plusieurs dizaines d’homme, cachés jusque là, en embuscade, des deux
cotés de la route, qui fuirent à grandes enjambés.
— Pff, aucun courage, s’exclama Jaddo en retournant vers
son loup.
— Reprenons la route, annonça Sans Trema au reste du
convoi.
C'était la troisième fois
que le convoi était "attaqué", depuis son entrée dans la foret, avec
toujours le même résultat.
La route s’avéra plus
pacifique pendant quelques heures. L’hypothèse d’une arrivée à Vorrim sans
nouvelle embuscade commençait presque à germer.
Soudain le convoi
s’arrêta. Aucun des membres du Fléau n’avait ordonné cette pause.
Les 3 guerrières se
retournèrent pour comprendre ce qu’il se passait, mais les soldats
restaient impassibles, le cocher était immobile.
— Pardon, mais on peut savoir ce qui vous arrive ?
demanda Sans Trema, non sans une pointe d’agacement.
Personne ne bougea,
aucune réponse.
Sans Trema descendit de
son cheval et s’approcha du chariot en espérant que la proximité de son épée
pousserait quelqu’un à répondre à sa question.
Alors qu’elle approchait
du convoi, les 8 guerriers qui étaient à l’arrière se mirent en mouvement et
s’intercalèrent entre elle et le chariot.
— Je peux savoir ce que c’est que ce délire ? s’énerva
Sans Trema.
Jaddo descendit de son
loup et alla rejoindre Sans Trema. UberKlaus ne bougeait pas de son cheval.
Les guerriers se mirent
alors autour des deux guerrières. Le bruit des épées sortant de leur fourreau
exalta Jaddo.
— Et moi qui avait peur de m’ennuyer avec cette mission,
me voila ravie, s'extasia l'orque.
Le combat fut lancé quand
une première épée tenta de frapper le flanc droit de Jaddo. Le coup était
précis et rapide. Si elle n’avait pas utilisé le renforcement d’armure au
niveau de son avant bras droit pour dévier la lame, un tel coup aurait pu lui
être fatal. Profitant de l’espace que lui libéra ce dégagement, elle utilisa le
pommeau de son marteau pour frapper son ennemi à la mâchoire. Dans son élan, elle aurait pu le tuer si
une autre épée n’était pas venue s’intercaler entre elle et la tempe de son
adversaire. Sans Trema dut éviter un coup quasiment similaire, mais se baissa
en plus pour esquiver une deuxième attaque, elle en profita pour sectionner
deux chevilles.
Les quatre cavaliers se
mirent alors à galoper en direction d’UberKlaus. Elle eut le temps de décocher
une flèche qui transperça le front du cavalier le plus à droite, avant de
demander à son cheval de se dégager de l’axe principal. Elle savait qu’en
mouvement, même à courte distance du groupe, elle aurait un avantage certain.
Jaddo reçut un coup de
pied au niveau du creux poplité gauche qui lui fit poser genou à terre. Cela ne
manqua pas d’attiser sa colère. Elle fractura le nez de celui qui lui faisait
face et dont la lame commençait à s’abattre sur elle. Elle fit une roulade sur
le coté droit et brisa le genou droit de l’homme qui était à sa portée.
Profitant de sa chute, elle lui arracha son épée et la lança vers un autre
ennemi qui tomba au sol, le sternum coupé en deux.
Sans Trema extirpa son
épée de la gorge d’un des assaillants dont le cri de douleur fut étouffé par le
sang qui noyait sa trachée. Dans un mouvement de moulinet calculé, elle
sectionna par la même occasion la carotide de celui qui s’approchait sur sa
droite.
UberKlaus faisait le tour
du convoi, à une allure fixe. Un deuxième cavalier fit les frais de son adresse
au tir. D’une flèche, UberKlaus sectionna les attaches gauches de sa selle.
L’homme bascula sur le coté et termina au sol, mort, après que son visage fit
la connaissance rapprochée d'un tronc bien trop solide pour ses cervicales.
Ils n’étaient plus que
trois à tenter d’attaquer Sans Trema et Jaddo. Elles se mirent alors dos à dos
et anticipèrent l’attaque de leurs ennemis, prenant l’initiative à leur compte.
Il ne fallut que 4 coups
pour que les trois guerriers restants se retrouvent au sol. En cinq morceaux
distincts.
UberKlaus venait mettre
de un troisième poursuivant au sol, d’une flèche qui fit chatouilla sa rétine
droite avant de ressortir par son os occipital. Le dernier cavalier passa
à portée de Jaddo. Elle ramassa son marteau et lui lança au visage. Au sol, le
cavalier repris ses esprits pour voir qu’il était à vingt centimètres du sol, tenu par le cou, son casque
n'était plus là et les crocs d'une orque en colère frôlaient sa mâchoire.
— Pourquoi, vous nous avez attaqué ? demanda
Jaddo.
Aucune réponse.
Elle s’énerva.
— Réponds où je te fais compter tes os au rythme de
leurs craquements.
La peur pouvait se lire
sur le visage du dernier survivant du Fléau, mais aucun son ne sortait de sa
bouche.
Dans un accès de colère,
elle le projeta contre un arbre. L’homme fut transpercé de part en part par une
branche solide.
Sans Trema s’approcha et
examina le corps
— Regardez. Son cou. C’est un tatouage.
UberKlaus prit un petit
couteau et découpa la peau autour du tatouage.
— On demandera, une fois à Vorrim si quelqu’un
connaît ce dessin, moi il ne me dit rien.
— Venez voir, hurla Jaddo qui venait de casser un coté du
chariot principal avec un coup massif.
— Des chaines, des attaches, mais pour une seule
personne. Et aucun prisonnier. Qu’est ce que c’est que ce délire ?
s'interrogea Uberklaus.
— Je n'aime pas trop ça, répondit Sans Trema.
— Heureusement que nous avons déjà été payé, souligna
Uberklaus.
— Allons à Vorrim pour voir si quelqu’un peut nous éclairer
sur tout ça, que l’on aille ensuite trancher la tête du responsable, conclut
Jaddo.
**
Qffwffq et Doc Marmotte
venaient de partir. Le bureau de Souristine était plus sombre que d’habitude.
Seuls quelques bougies empêchaient l’obscurité de dominer la pièce.
— J’ai fait ce que tu m'avais demandé dit la magicienne,
assise, droite, devant son bureau, semblant parler dans le vide, j’espère que
tout se passera comme prévu » ajouta t’elle.
Il y eut un silence
plusieurs secondes avant qu’une autre voix féminine ne se fit entendre depuis
le recoin le plus sombre de la pièce.
— Tout ira pour le mieux. Tu as fait ce qui était
nécessaire.
— Tu ne m'as pas vraiment laissé le choix, argumenta
Souristine.
Aucune réponse. Elle
était de nouveau seule dans son bureau.
[1] le nom de ce personnage est ici
retranscrit selon ce qui pourrait s'en rapprocher le plus phonétiquement
parlant, mais il est techniquement impossible pour l'auteur d'écrire le nom
exact de ce personnage. Merci de votre compréhension
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